Voici notre prix Goncourt 2011 : un premier roman, un pavé de 630 pages qui parle de la guerre et publié dans la "bla nche" de Gallimard, qui plus est. On a l'impression d'être revenu cinq ans en arrière, avec "Les Bienveilla ntes" de Jonathan Littell. Tout semble réuni pour que je me régale : j'aime, à de rares exceptions, les livres qui obtiennent le prix Goncourt, j'aime les romans un peu trapus, j'aime le prestige de la collection, le titre me parait annonciateur de que lque chose qui a de la gueule, et en plus, c'est un auteur lyonnais... C'est donc le premier roman d'Alexis Jenni, né à Lyon en 1963. Professeur de sciences et vie de la terre, il enseigne dans un prestigieux établissement lyonnais au coeur du quartier d'Ainay.
"L'art français de la guerre" est un roman à la première personne qui se déroule en 1991, pendant les préparatifs de la guerre du Golfe. Le narrateur, on ne connait pas son nom, et donc, nous l’appellerons... le narrateur. Il vit dans Lyon dans un petit appartement presque vide. Il est en voie de marginalisation. Il a perdu petit à petit son travail , sa compagne et tous ses biens et veut s'essayer à la peinture. Il fait la connaissance un jour de Victorien Sala gnon en découvrant ses peintures à l'encre que celui-ci essaie de vendre sur un marché. Le narrateur demande à Sala gnon de lui apprendre la peinture. Une étrange rela tion va alors s'établir entre eux. Sala gnon, ancien para ayant fait l'Indochine et l'Algérie, arrive aujourd'huià l'âge ou il a envie de raconter sa vie. Mais il est incapable de mettre en forme sa pensée. Le narrateur, qui a des facilité à écrire, va alors, en échange de cours de peinture, faire la biographie de Victorien Sala gnon.
Le roman va donc alterner des scène de la vie contemporaine des deux personnages (en 1991, donc), et la biographie de Sala gnon. Et l'on découvre donc Victorien Sala gnon à plusieurs époque s de sa vie. Depuis son adolescence sous l'Occupation pendant la que lle Sala gnon va partir dans le maquis, en passant par la guerre d'indochine pour finir pendant la guerre d'Algérie. Tout cela entrecoupée par le récit en 1991 des rencontres du narrateur avec Sala gnon au cours desque lles apparait souvent un certain Mariani, une sorte de beauf très nationaliste pour qui Sala gnon garde toutefois une amitié solide depuis la guerre d'Indochine.
Première chose sur ce roman qui saute au yeux : il est excessivement bien écrit. La France est un pays de lettres : alors que quasiment tous les écrivains américains sont professeur de littérature, en France, un professeur de biologie peut écrire de façon aussi merveilleuse. Alexis Jenni a du talent, une facilité avec la la ngue, de la poésie dans sa prose.
Deuxième chose : c'est long. Beaucoup trop long. Et croyez-moi, j'adore les romans très épais. Mais je trouve un déséquilibre très marqué entre le fond et la forme. Autant la partie biographie de Sala gnon du roman est plutôt intéressante et encore une fois magnifique ment racontée, autant la partie actuelle du roman est beaucoup trop longue, inintéressante, pompeuse. Par moment, la prose de Jenni tourne à la grandiloque nce et frise le ridicule.
Je n'oublie certes pas qu'il s'agit d'un premier roman. Peut-être qu'un écrivain plus aguerri aurait fait des coupes franches. La forme du roman est originale avec la partie narration et la partie biographie de Sala gnon. Mais il s'éparpille trop entre le récit (dans la partie narration), des avis sur la politique , la vie privée du narrateur (avec une scène assez ridicule dans un supermarché), des commentaires récurrents sur les forces de l'ordre, des séries de cinq ou six paragraphes commençant par la même phrase pour bien insister sur des idées....
Alors pour moi, c'est un peu du gâchis. L'idée du roman était bonne, le style est parfait mais le développement est raté. Il aurait vraiment fallu faire que lque s coupes franches pour épurer tout ça. Encore une fois, je trouve qu'un auteur français "s'écoute" un peu trop écrire. Dommage ! Mais le talent est bien là. Je suivrai les prochains écrits d'Alexis Jenni.
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