vendredi 9 mai 2008

La copie privée

La redevance sur la copie privée


Avant toute chose, je tiens à préciser que je suis contre toute forme de piratage, que cet article ne fait en aucun cas la publicité sur quelque forme de piratage que ce soit et que le piratage est sévèrement puni par la loi.


Vous ne le savez peut-être pas, mais lorsque vous achetez un cd vierge, en plus du cd et de la TVA, vous payez une taxe : la redevance sur la copie privée. La copie privée ( article L 122-5 du Code de la propriété intellectuelle : http://www.celog.fr/cpi/lv1_tt2.htm ) est, entre autre, l'autorisation faite à une personne qui vient d'acheter un album de musique ( par exemple ) d'en faire une ou plusieurs copies pour son usage privé. A noter que ce droit ne s'applique pas aux oeuvres logicielles ou graphiques.

C'est cette loi qui vous autorise à enregistrer un film qui passe à la télé pour le revoir dans un cadre familial ou de faire une copie du dernier album de Jenifer ( oui, pourquoi pas !? ) pour pouvoir jouir de sa musique dans votre voiture ( allez-y mollo quand même ).

Depuis le 1er octobre 2007, de nouveaux supports sont concernés par la recevance : les clés USB, les disques durs externes et les cartes mémoires. Ils s'agitent à une liste déjà bien longue. Et tout ça s'est fait dans un silence radio total des média.

Le Barème de la redevance au 1er janvier 2008 :


Intitulé du support

Taxe HT appliquée

DVD vierges

1 € pour 4,7 Go à partir de septembre

CD-R/RW audio

45,73 € pour 100 heures (0,61 € pour 80 minutes)

CD-R/RW data

50,43 € pour 100.000 Mo (0,35 € pour 700 Mo/80 minutes)

Disquettes 3,5" 1,44 Mo

0,015 €

TV, baladeurs et boîtiers dotés de mémoire ou disque dur et capables d'enregistrer des vidéogrammes

De 10 à 50 € selon la capacité, par tranches

Baladeurs et appareils de salon dotés de mémoire ou disque dur et capables d'enregistrer à la fois des vidéogrammes et des phonogrammes

De 5 à 50 € selon la capacité, par tranches

Minidisc

45,73 € pour 100 heures

Cassettes vidéo

42,84 € pour 100 heures

Cassettes audio

28,51 € pour 100 heures

Cartes mémoire flash

Capacité inférieure ou égale à 512 Mo

0,144 € le giga-octet

Capacité supérieure à 512 Mo et inférieure ou égale à 2 Go

0,090 € le giga-octet

Capacité supérieure à 2 Go et inférieure ou égale à 5 Go

0,072 € le giga-octet

Capacité supérieure à 5 Go et inférieure ou égale à 10 Go

0,062 € le giga-octet

Capacité supérieure à 10 Go et inférieure ou égale à 16 Go

0,059 € le giga-octet

Clés USB

Capacité inférieure ou égale à 512 Mo

0,300 € le giga-octet

Capacité supérieure à 512 Mo et inférieure ou égale à 1 Go

0,225 € le giga-octet

Capacité supérieure à 1 Go et inférieure ou égale à 2 Go

0,180 € le giga-octet

Capacité supérieure à 2 Go et inférieure ou égale à 5 Go

0,144 € le giga-octet

Capacité supérieure à 5 Go et inférieure ou égale à 10 Go

0,130 € le giga-octet

Capacité supérieure à 10 Go et inférieure ou égale à 16 Go

0,125 € le giga-octet

Disque durs externes à usage personnel

Capacité inférieure ou égale à 80 Go

0,0597 € le giga-octet

Capacité supérieure à 80 Go et inférieure ou égale à 120 Go

0,0507 € le giga-octet

Capacité supérieure à 1 Go et inférieure ou égale à 160 Go

0,0403 € le giga-octet

Capacité supérieure à 160 Go et inférieure ou égale à 200 Go

0,0333 € le giga-octet

Capacité supérieure à 200 Go et inférieure ou égale à 320 Go

0,0272 € le giga-octet

Capacité supérieure à 320 Go et inférieure ou égale à 400 Go

0,0237 € le giga-octet

Capacité supérieure à 400 Go et inférieure ou égale à 1000 Go

0,0200 € le giga-octet


Ce qui représente par exemple :

  • une augmentation de 3,27% sur une clé USB 1 Go vendue 6,99€ le 19/10/2007 sur cdiscount.fr

  • une augmentation de 10,48% sur un disque dur de 400 Go de marque Néo vendu 99,99€ le 19/10/2007 sur ldlc.com !

  • 20€ sur un disque dur de 1 To.

  • Une augmentation de 120,68% sur un pack de 25 cd vierges vendus 16,19€ le 19/10/2007 chez rue du commerce.com.

Et la loi ne va certainement pas s'arrêter là puisqu'à priori les consoles de jeux, les disques dur internes, les agendas électroniques, les téléphones portables à mémoire, les HD-DVD et les blu-Ray sont dans le collimateur du legislateur. Et le plus étonnant : LE PAPIER.

En regardant bien le tableau ci-dessus, vous constaterez avec amusement ( enfin, pas si amusant que ça, c'est avec votre pognon tout de même ) que les disquettes de 1,44Mo sont soumises à la redevance. Ça fait un peu juste, 1,44Mo pour pirater une musique ou un film... ( Ou alors à la limite un film de Mocky. Si si, certains tiendraient peut-être sur une disquette ).

Mais jusqu'où le lobby du disque va-t'il vouloir aller. Pourquoi ne pas taxer les stylos ( qui ne servent qu'à recopier des textes protégés ), les photocopieuses( idem ), les appareils photos, les camescopes, les imprimantes, les scanners, l'encre, internet...? Et puis comme les français ne pourrons plus acheter de dvd vierdes, de disques durs ou de clés usb ( occupés qu'ils seront à rembourser le crédit qui a servi a acheter des tomates et des pâtes ), il faudra les taxer sur ce qui permet de faire marcher ces machines ( et donc contribue à la piraterie ) et ce dont personne ne peut se passer : l'éléctricité.

Tout peut servir de près ou de loin à faire de la copie.

La double peine

Ces sommes, on est bien d'accord, vous sont réclamées (ou plutôt sont ponctionnées automatiquement lors de l'achat ) quelque soit l'utilisation que vous faites de ces supports. Si vous achetez un cd ou un disque dur afin de faire des sauvegardes de vos photos, par exemple, et bien vous rémunérez Koxie et ses producteurs par la même occasion ( dit comme ça, ça fait mal aux sphincters ).

Le législateur ( poussé par les lobbies ) part du principe qu'une personne qui achète une clé USB est un pirate et donc qu'il doit dédommager les ayant-droit. Ou du moins, doit payer pour ceux qui piratent des œuvres. Là où le serpent se mort la queue ( jusqu'à la nuque ), c'est que lorsque vous faites sur un cédérom une copie d'un album de musique ( pour pouvoir l'écouter chez vous et dans la voiture par exemple ) que vous venez d'acquérir, vous payez deux fois. C'est ce que j'appelle la double peine. Le gars honnête paie double.

Car bien évidemment, s'acquitter de la redevance ne vous autorise en aucune façon à graver sur un support une œuvre que vous n'avez pas acheté ou de copier pour un copain une œuvre achetée.

C'est un peu limite, mais le raisonnement suivant peut presque sembler légitime : « Si je ne pirate pas, je suis une burne car je paie pour ». Attention, je tiens bien à répéter qu'il ne faut en aucun cas pirater une œuvre. Mais le problème, c'est que le principe de cette loi peut amener à penser ça pour certains.

Joey Starr, un fonctionnaire ?

Houlala ! Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit... Surtout que le gars a l'air un poil chatouilleux. Et l'on en est pas encore là. Mais la redevance sur la copie privée me pose un problème tout de même. L'argent récolté est dispatché aux divers ayant-droit ( auteurs, artistes, producteurs, maisons de disques...) par 2 organismes : la Sorecop ( pour l'audiovisuel ) et Copie France ( pour la musique ).

Du coup, l'état lève l'impôt pour des intérêts privés. Et cela ne dérange personne. Il faut dire que le lobby des maisons de disques est impressionnant, emmené par un Pascal Nègre, PDG d'Universal Music et président du syndicat national de l'édition phonographique, véritable homme d'influence. Et bien moi, ça me gêne !

Ca me gêne qu'on me taxe quand j'achète un cd, une clé USB ou un dvd vierge pour maintenir le niveau de revenu des artistes ou des dirigeants de maisons de disque. Tout le monde part du principe qu'un artiste doit gagner plein d'argent. Vu la soupe qui est produite en ce moment, peut-être que d'avoir un peu faim, ça les feraient se déchirer un peu, nos auteurs. A vouloir plaire à tout le monde, on écoute plus que de la daube.

De plus, je ne suis pas sur que les revenus des artistes baissent tant que ça car les produits merchandising se multiplient, les ventes de dvd musicaux viennent s'ajouter aux ventes de cd et surtout, les prix des places de concert ont complètement explosé.

  • 28,80€ pour aller voir Cali à Lyon, artiste en devenir et grand prescripteur du vote à gauche aux dernières élections présidentielles. Combien de couples d'ouvriers peuvent se permettre de débourser presque 60 euros pour une soirée, sans compter le casse-croûte et une petite bibine ou deux pour étancher la soif provoquée par la chaleur de la foule ( à consommer avec modération ) ?

  • 43,00€ pour Lavillier à Lyon.

  • Et que dire d'Aznavour ( de 54€ à 89€ ) ou de Céline Dion ( de 78,50€ à 205€ ) parmi plein d'autres.

Que ces artiste gagnent beaucoup d'argent, ça ne me gêne absolument pas. Mais qu'on essaie pas de nous faire pleurer sur leur sort !

Dis, papa, ça sert à quoi une maison de disques ?

Il y a quelques années de cela ( je vous parle d'un temps que les moins de 20 ans... ), une maison de disques servait à découvrir de nouveaux artistes, à les promouvoir, à les faire connaître du grand public, à les faire mûrir, à lancer des carrière sur le long terme.

Mais ce temps là est révolu. Le but d'une maison de disques est maintenant de faire de l'argent, le plus possible et surtout le plus vite possible. Résultat : pas de grande nouveauté dans la production actuelle, des reprises à tire larigot, des best of, et des artistes préfabriqués lancés par des émissions qui portent bien leur nom comme « la Nouvelle Star », « Star Academy ». Ils ne recherche pas un chanteur, un nouveau talent, mais directement une star. Quelqu'un de rentable tout de suite...

Donc, il fallait s'y attendre, les gens en ont eu marre. Payer entre 15 et 20 albums et ne pas en avoir pour son pognon, ça va 5 minutes. A coté de ça, le développement du haut débit et la démocratisation des ordinateurs ont eu raison des ventes d'album : Un ado de 12 ans ne sais plus écrire mais connais le fonctionnement d'un logiciel de P2P.

Faire comme Pascal Nègre et ne regarder que son nombril et le passé ne fera pas revivre le cd. C'est fini.

Du coup, les artistes se posent eux aussi cette question : pourquoi une maison de disque ? Pourquoi continuer à leur verser des marges confortables si elles ne font plus leur boulot. Plus besoin de graver des cd, de concevoir des pochettes, de trouver des accords avec les distributeurs puisqu'un site internet suffit pour diffuser sa musique.

C'est la réflexion que se sont faite ou se font de plus en plus d'artistes ( radiohead, Manu Chao, The Charlatans, Jamiroquai... ). Artistes qui retrouvent leur liberté et donc peut-être de l'inspiration. Des précurseurs en la matière : le groupe Marillion, qui après bien des soucis avec sa maison de disques, a décidé de produire ses album lui-même en les pré-vendant sur internet à ses fans, ce qui leur confère une liberté artistique confortable.


La redevance sur la copie privée n'a aujourd'hui d'autre utilité que de permettre à des personnes proches du pouvoir de continuer à ( bien ) vivre avec un modèle économique complètement dépassé. Sur notre dos...

Depuis quelques mois toutefois, la commission copie privée, en charge de fixer les taxes sur les supports numériques, est agitée de graves remous. Plusieurs intervenants des la commission ont claqué la porte. La taxe qui s'applique sur les téléphone portable a été semble-t'il la goutte qui a fait déborder le vase. A suivre...



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